“Un très bel ouvrage” – LE MATIN DIMANCHE
“Un verbe épuré, efficace” – LES NOUVELLES
“Passionnant!” – LE COURRIER
“Des anecdotes savoureuses” – LA TRIBUNE DE GENEVE
“Un livre sublime ” – ONE FM
“Une belle promenade imagée” – GHI

L’Exposition nationale de 1896 bouleverse Genève. L’urbanisme, l’industrie et, même, la navigation sur le Léman en sont influencés. Le réveil est difficile et Genève connaît des troubles sociaux. C’est le temps des usines hydrauliques, du rail conquérant, des machines imposantes et des avions fragiles; de l’électricité et de la nouvelle mobilité. Des quartiers entiers sortent de terre. On bâtit des ponts et l’on replante le vignoble. La campagne mue. Seuls les marchés paraissent immuables – et le geste de l’horloger.

Accompagnant 400 cartes postales de la collection Morisoli, André Klopmann restitue l’esprit de ce temps ; ses débats, ses figures et un certain contraste social (Paris, Hervé Chopin).

 

Premières lignes :

La Genève de la Belle Epoque n’était pas encore « internationale », comme on le dit aujourd’hui en raison de la présence de l’ONU et de nombreuses agences, mais déjà cosmopolite. C’est sans doute sa situation géographique qui lui vaut ce privilège. Au Moyen-Age, on franchissait difficilement les Alpes pour traverser l’Europe du nord au sud et réciproquement. A l’ouest du massif montagneux, sur le Rhône, il y avait des ponts fameux, à Genève précisément – et là, c’était plus facile. Le fleuve par ailleurs offrait dans l’autre sens des possibilités de transport des Alpes à la mer, ce qui s’avérait bien commode pour le commerce.

Les foires et des marchés qui se sont développés autour de ces ponts ont ainsi assuré à Genève une réputation et une prospérité sans pareils. Ils ont fait naître des établissements financiers qui doivent beaucoup, aussi, à l’immigration protestante de France et d’Italie aux XVIe et XVIIe siècles. Brièvement française sous Napoléon, et par ailleurs sarde pour une partie non négligeable de ses communes, le canton de Genève conserve des frontières communes bien plus étendues avec la France qu’avec la Suisse. Ce qui participe à sa singularité.

La Belle Epoque s’étend globalement de la fin de la Grande dépression (1896) à l’orée de la Première Guerre mondiale (1914). Elle est heureuse mais pas insouciante. Entre 1888 et 1900, la population progresse de plus de 25% pour atteindre 132 000 habitants. Aux Grottes, à Saint-Gervais, aux Pâquis, l‘habitat populaire se développe grâce, le plus souvent, à des mécènes ayant nom, par exemple, Vallin ou de Grenus. La campagne mue aussi. L’essor du chemin de fer autour d’une gare construite à l’extérieur de la ville, afin de ne pas incommoder la cité par les suies et le bruit – la gare Cornavin donc, aujourd’hui centrale et électrifiée – s’appuie sur la révolution industrielle. Le monde du travail passe au rythme de l’usine, du piston-vapeur et des tensions sociales. Les syndicats s’organisent, le Parti socialiste suisse se constitue en 1892 et un mouvement de colère de la Compagnie genevoise des tramways électriques (CGTE) déclenche en 1902 la première grève générale de Suisse.

Remarquable en particulier dans les quartiers de Sécheron, Charmilles et de la Jonction, l’industrialisation voit naître à Genève des automobiles, des machines-outils, des briquets, des composants électriques ou des échelles de pompier. Comme ceux des poètes de Trenet, leurs noms courent encore dans les rues : Magirus, Pic-Pic, Kugler et j’en passe. Même le jet d’eau a des origines industrielles. C’est, au départ, un régulateur de la consommation hydraulique que l’on déplace en 1891 pour l’ornement de la rade. Quant à l’horlogerie, on ne peut y échapper. Elle est un avatar, pour l’essentiel, des temps calvinistes. La rigueur morale réprimait les bijoux, alors soit ! On a fait des montres, utiles donc et non futiles, quoique parfois… Ouvragées aussi finement que la haute joaillerie.

La Belle Epoque a ceci de particulier qu’elle reste présente à Genève non seulement au travers de certaines architectures cossues des bords du lac mais, aussi, sur l’eau par l’élégance des bateaux à aube. La flotte Belle-Epoque de la Compagnie générale de navigation est la plus importante d’Europe. Basée à Lausanne mais battant pavillons suisses et français, elle influence grandement le paysage urbain genevois. Ces images flamboyantes d’une Suisse paisible contrastent la réalité moins connue d’une misère présente dans certains quartiers oubliés par l’eau courante et l’électricité, comme les Grottes, dont le secteur situé en amont de la gare Cornavin n’a pas été beaucoup photographié, au contraire du secteur aval.

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